RDC : le niveau des discours de haine en ligne est au rouge

Sur une période allant du 18 janvier au 18 février 2021, Africa sans haine a documenté les discours de haine en République démocratique du Congo. Nous nous sommes focalisés sur le réseau social Facebook, étant donné que les internautes congolais l’utilisent pour faire passer un grand nombre de messages haineux et dangereux.

Notre démarche a consisté à identifier les auteurs de tels messages et les raisons qui les poussent à les propager. Il s’avère que la plupart des messages de haine sont propagés volontairement et avec plaisir pour faire mal à ceux qui sont visés.

Facebook transformé en un instrument de la haine

Il existe une centaine de groupes et pages Facebook à caractère politique, culturel et tribal en RDC. Nous nous sommes intéressés à 10 d’entre eux en rapport avec des provinces comme Kinshasa, Bandundu, Kasaï, Kivu, Equateur et Katanga. 95% de discours haineux, violents ou dangereux y sont alimentés par des personnes qui revendiquent l’appartenance à telle ou telle tribu contre telle ou telle autre, ou encore le soutien à tel ou tel leader politique, le plus souvent ressortissant de leur région d’origine.

Ainsi, du 18 janvier au 18 février 2021, Africa sans haine a observé les groupes, pages et profils Facebook où interviennent des internautes congolais respectivement partisans de :

  • Félix Tshisekedi ;
  • Jean-Pierre Bemba ;
  • Joseph Kabila ;
  • Martin Fayulu :
  • Moïse Katumbi et
  • Vital Kamerhe. (Nous avons classé leurs noms selon l’ordre alphabétique).

Des messages de haine chaque jour

Ce travail nous a permis d’identifier 510 discours haineux ou dangereux et 3 000 commentaires du même type diffusés sur divers canaux tels que les comptes privés, groupes et pages Facebook en seulement 30 jours. Parfois, un seul groupe ou page enregistre entre 5 et 10 messages de haine par jour ! 90 % de ces messages sont liés aux événements politiques en cours dans le pays, surtout lorsque tel camp ou tel leader politique est en position de force ou de faiblesse.

Nous avons observé que l’expression de la haine est beaucoup plus prononcée dans les langues congolaises, notamment le swahili, le lingala et le tshiluba. Si certains de ces messages sont exprimés en langues nationales, c’est parce qu’ils permettent d’affirmer l’argument identitaire et ethnique de ceux qui les diffusent.

Nous avons remarqué que les internautes derrière ces messages encouragent des attaques contre des personnalités socio-politiques, des revendications sécessionnistes, l’apologie de la violence armée, des menaces contre certaines tribus ou simplement des injures et des dénigrements. De ces messages, transparaissent les oppositions entre tribus, souvent amplifiées par les mésententes entre leaders politiques, la désinformation, la stigmatisation et les fakenews.

Les principales victimes de messages de haine sont entre autres les Kasaïens, les Banyamulenge, les Bayaka, etc. Sur les 10 groupes et pages Facebook que nous avons observés, l’espace grand Katanga passe pour la zone rouge des discours de haine tribale et de xénophobie, avec plus de 70 % de messages haineux documentés. Ici Kasaïens et Katangais s’affrontent régulièrement sur les réseaux sociaux : menaces, appels aux meurtres, animalisation, appels à chasser les non-originaires…

Les plus grands propagateurs de messages de haine en République démocratique du Congo sont les hommes : 99%. Et ils sont en majorité des jeunes. Les femmes, quant à elles, se contentent de liker ou de commenter mais assez rarement.

Pourquoi péfèrent-ils les groupes et pages Facebook ?

Les groupes et pages Facebook offrent une forte audience. Certains groupes ont plus de 50 000 membres. Ce qui représente un énorme canal de diffusion de messages de tout genre. En plus, un utilisateur peut appartenir à plusieurs groupes. Ce qui lui permet de partager son discours haineux pour atteindre le plus de monde possible.

Bien que certains groupes et pages soient créés conformément aux thématiques proposées par Facebook, il arrive que leurs promoteurs les détournent de leur mission principale. De cette manière ils deviennent des vecteurs de la haine et de la désinformation, soit leurs promoteurs sont complices, soit ils ne savent plus en gérer les contenus. Pourtant, Facebook offre la possibilité de censurer tous les messages violents, haineux ou dangereux. #StopLaHaine

@Facebook

Vous voulez consulter toutes les données de ces statistiques, envoyez un E-mail à info@africasanshaine.org

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