Conférence de réconciliation entre Katangais et Kasaïens : le problème demeure
Après le scandale créé par les propos tribalistes et xénophobes de la députée Dominique Munongo contre les Kasaïens, les autorités ont organisé une conférence de réconciliation à Lubumbashi. Une initiative louable, mais qui ne résout pas le fond du problème.
Ouverte le 22 avril 2022 à Lubumbashi par le Premier ministre Sama Lukonde sur le thème : « Exode rural et développement des provinces », la conférence de réconciliation entre les provinces du grand Katanga et celles du grand Kasaï a permis d’aborder sans tabou les questions qui opposent les deux parties. C’est notamment les discours de haine et le flux migratoire des Kasaïens vers le Katanga.
Ces assises pour le vivre-ensemble et la cohabitation pacifique ont mis face-à-face les délégations des provinces du grand Katanga et celles du grand Kasaï. Chefs coutumiers, gouverneurs de provinces et personnalités politiques y ont participé. Objectif : mettre fin aux vives tensions interethniques nées des propos de la députée katangaise Dominique Munongo. Celle-ci avait, dans une vidéo, condamné l’arrivée massive des Kasaïens dans le Katanga. Des propos xénophobes et haineux qui avaient choqué la communauté kasaïenne.
Le chef de l’Etat congolais Félix YTshisekedi s’est rendu lui-même à Lubumbashi pour clôturer ces assises.
Le problème reste entier
La conférence de Lubumbashi aura eu le mérite de pousser les parties à se parler et à faire retomber la tension. Mais en réalité, rien n’a changé : sur les réseaux les messages de haine et les appels à chasser les Kasaïens continuent comme d’habitude. En fait, le vrai vivre-ensemble ne pourra revenir entre les deux communautés que si le problème est résolu à la souche.
Nul ne peut nier que l’exode massif des Kasaïens est dû à la misère qui frappe le Kasaï. Le président congolais Félix Tshisekedi étant lui-même Kasaïen, a intérêt à favoriser le développement des provinces du grand Kasaï. Celles-ci manquent de tout : eau, électricité, routes, denrées alimentaires, etc.
La vie chère au Kasaï doublée d’un chômage chronique fait que la seule solution est d’aller voir ailleurs. Les principales destinations de l’exode des Kasaïens c’est Lubumbashi et Kinshasa. Du coup, tant que les conditions de vie ne s’amélioreront pas au Kasaï, il faudra toujours s’attendre à des départs massifs vers le Katanga et la capitale congolaise.
Toutefois, en aucun cas, cette situation ne peut justifier des discours de haine contre des Kasaïens dans leur propre pays. Le Kasaïen, comme tout citoyen congolais, a le droit d’habiter là où il veut sur le territoire national. On ne devrait pas non plus oublier que la situation de pauvreté que traverse le grand Kasaï aujourd’hui est aussi le résultat du fait que cette partie du pays a été abandonnée depuis des décennies par les différents régimes qui se sont succédé à Kinshasa, probablement parce que la région était considérée comme le bastion de l’opposition.
Ce qu’il faut faire
Pour stopper l’exode, il faudrait mettre au Kasaï des conditions qui permettent aux Kasaïens de rester dans leurs provinces. Il faut créer des entreprises pour engager les jeunes et résorber le chômage. Il faut rendre disponibles l’eau courante et l’électricité. Construire les infrastructures qui manquent : routes asphaltées, ponts, hôpitaux, etc. Faciliter les opportunités pour les jeunes… C’est seulement à ces conditions que l’on peut espérer juguler l’exode.
Des efforts de reconstruction sont en cours au Kasaï, mais ils sont encore insuffisants. Les Kasaïens qui souvent investissent ailleurs doivent aussi songer à investir dans leurs provinces. Et ils en ont les moyens.