Nicolas Mbiya : « Les politiciens doivent savoir que les discours de haine, ce n’est pas un projet de société ! »
L’activiste du mouvement citoyen Lucha, Nicolas Mbiya, était l’un des participants à la formation organisée par Africa Sans Haine à Mbujimayi sur la lutte contre les discours de haine en période électorale. Pour lui, journalistes, candidats, partis politiques et acteurs de la société civile… tous devront bannir les discours de haine lors des élections. Nicolas Mbiya nous a accordé une interview après la formation.
Africa Sans Haine : Que pensez-vous de la montée des discours de haine en période électorale ?
Nicolas Mbiya : On ne doit pas considérer les élections comme une occasion de brûler le pays ou de le faire sombrer dans l’instabilité. La vie doit continuer après les élections.
Les discours de haine sont capables du pire. Malheureusement, ils sont utilisés par les politiques comme un argument de campagne électorale ou un argument pour faire asseoir leur influence en détruisant les autres. Les politiciens ne prennent pas conscience de ce que cela peut avoir comme conséquences sur la communauté et le vivre-ensemble. Aujourd’hui, alors qu’on s’approche des élections, chacun doit prendre conscience du danger que représentent les discours de haine sur le vivre-ensemble, et leur capacité à détruire la paix dans une communauté.
Nous devons dénoncer sévèrement les discours de haine d’où qu’ils viennent. Et aussi propager les messages positifs pour faciliter le vivre-ensemble.
Pourquoi les jeunes sont parmi les grands propagateurs de discours de haine ?
Cela s’explique par le fait que les jeunes sont manipulables. Ils grandissent à l’heure des réseaux sociaux. Étant donné qu’il n’y a pas une régulation solide sur Internet, les jeunes se sentent libres d’écrire n’importe quoi. Ils se laissent manipuler et influencer par des discours politiques. Ce qu’il faut faire c’est sensibiliser les jeunes à prendre conscience du danger que représentent les discours de haine.
Que doit faire le gouvernement pour mettre fin ou réduire les discours de haine ?
Je pense que le gouvernement doit user de son pouvoir pour sanctionner les personnes qui propagent les discours de haine. S’il n’y a pas de sanctions, les gens vont continuer avec de tels discours. Il faut des sanctions exemplaires. Qu’on soit ministre, député ou personnalité publique qui propage la haine, si on est sanctionné, cela peut changer beaucoup de choses.
A mon avis, le ministère de l’Initiation à la nouvelle citoyenneté peut être une arme que le gouvernement peut utiliser pour sensibiliser et engager le dialogue avec la population sur la cohésion nationale et le vivre-ensemble.
Quel message avez-vous pour ceux qui distillent la haine ?
Nous n’avons que la RDC comme pays. Si on ne sait pas se comporter en responsables et s’abstenir des propos haineux et dangereux, on va embraser le pays.
Aux acteurs politiques, je rappelle que les discours de haine, ce n’est pas un projet de société ! Ils doivent développer des arguments solides et proposer des politiques publiques à même d’améliorer les conditions de vie de la population et non user de discours de haine pour se faire élire.
Les acteurs de la société civile doivent amplifier la sensibilisation sur le danger des discours de haine. Et les journalistes sont appelés au professionnalisme. Ils ont une plus grande responsabilité. S’ils laissent n’importe qui larguer des discours haineux sur leurs médias, ils en seront tenus pour responsables.
Bref, pour moi, le maitre mot pour tout le monde c’est le sens de responsabilité. Nous devons diffuser des messages positifs pour encourager la réconciliation et le vivre-ensemble. Car, après les élections la vie va continuer. On va se regarder dans les yeux…
Jean-Hubert Bondo