Faux ! Le Kasaï n’occupe pas tous les postes privilégiés de l’État

Dans son message de nouvel an au peuple congolais, l’opposant Martin Fayulu a dénoncé ce qu’il a qualifié de  « tribalisme primaire du régime ». Pour lui, « une seule tribu bénéficie de nominations privilégiées dans les postes étatiques ». Ce qui est faux, et je peux le démontrer dans ce blog.

Posté sur X, le message de Martin Fayulu a enregistré (au jour où nous publions cet article), plus de 71000 vues, 225 partagés et 922 likes. En tant qu’opposant, le leader du parti Ecidé a le droit de critiquer la gestion du pays par ceux qui sont au pouvoir. Mais il n’a pas le droit d’inciter à la haine tribale. En pointant  du doigt la tribu de Félix Tshisekedi comme étant la seule qui « bénéficie de nominations privilégiées aux postes étatiques » Fayulu aurait dû donner des preuves pour étayer ses affirmations.

De prime abord, avant de parler de postes clefs ou privilégiés de l’État, il est important de les définir et de les énumérer. Peut-être pas une énumération exhaustive, mais de ce qui passe pour l’essentiel. En effet, les postes clefs de l’État sont des postes stratégiques et déterminants pour avoir la mainmise sur l’appareil étatique. Leur attribution peut venir d’une élection ou d’une nomination.

En dehors de la présidence de la République, les postes clefs sont connus. Ce sont notamment les postes de direction ou de commandement des institutions étatiques politiques, militaires, etc. Ainsi, on peut mentionner des postes tels que :

  • Le président de l’Assemblée nationale ;
  • Le président du Sénat ;
  • Le président de la Cour constitutionnelle ;
  • La primature ;
  • Les ministères régaliens ;
  • Le directeur de cabinet du chef de l’État ;
  • Le chef d’État major de l’armée ;
  • Le chef de la police nationale ;
  • Le président de la Céni ;
  • Le président de la Cour des comptes ;
  • Le chef de l’Inspection générale des finances ;
  • Les présidents des entreprises étatiques ;
  • Les gouvernorats des provinces ;
  • Les administrateurs de territoire ;
  • Etc.

Quelles sont alors les tribus qui occupent ces postes clefs ?

Après avoir énuméré l’essentiel de postes clés de l’Etat, citons à présent les noms de ceux qui les occupent et voyons s’ils sont tous de la tribu du président Tshisekedi :

  • Président de l’Assemblée nationale : Vital Kamerhe, province d’origine : Sud-Kivu ;
  • Président du Sénat : Jean-Michel Sama Lukonde, province d’origine : Haut-Katanga ;
  • Président de la Cour constitutionnelle : Dieudonné Kamuleta, province d’origine : Kasaï-Oriental ;
  • Première ministre : Judith Suminwa, province d’origine : Kongo Central ;
  • Ministère de l’Intérieur : Jacquemin Shabani, province d’origine : Nord-Kivu ;
  • Ministère de la Justice : Constant Mutamba : province d’origine : Lomami ;
  • Ministère des Affaires étrangères : Thérèse Kayikwamba Wagner, province d’origine : Kinshasa (elle est née d’un père allemand et d’une mère congolaise) ;
  • Ministère de la Défense : Guy Kabombo, province d’origine : Kasaï-Oriental ;
  • Ministère des Finances : Doudou Fwamba, province d’origine : Tshopo ;
  •  Directeur de cabinet du chef de l’État : Anthony Nkinzo Kamole, province d’origine : Sud-Kivu ;
  • Chef d’État major général de l’armée : Jules Banza Muilambwe, province d’origine : Grand-Katanga ;
  • Chef de la police nationale : Benjamin Alonga, province d’origine Grand-Equateur ;
  • Président de la Céni : Denis Kadima, province d’origine : Kasaï-Oriental ;
  • Président de la Cour des comptes : Jimmy Munganga Ngwaka, province d’origine : Kwilu ;
  • Chef de l’IGF : Jules Alingete, province d’origine : Grand Bandundu ;
  • Etc.

Si on ne considère que ces 15 postes clefs de l’État susmentionnés, 3 seulement sont occupés par des Kasaïens (tribu de Félix Tshisekedi) ; et 12 par des citoyens d’autres tribus et provinces.

Avec ces données, on ne peut pas être honnête et affirmer que les Kasaïens occupent tous les postes privilégiés de l’État. Ceux qui tiennent ce genre de discours sont ceux qui n’ont jamais aimé voir un ressortissant du Kasaï occuper un poste important dans le pays. Et Fayulu est de leur nombre. C’est de la haine tribale pure et simple.

En provinces

S’agissant des postes de gouverneurs de provinces, nul ne peut dire que tous les 26 gouverneurs sont originaires du Kasaï. Car, en raison du principe de « la territoriale des originaires », chaque gouverneur est en principe originaire de la province qu’il dirige. Sauf dans la capitale Kinshasa où l’actuel gouverneur Daniel Bumba est originaire du Kongo-Central. Ses prédécesseurs directs étaient du Bandundu (Gentiny Ngobila, André Kimbuta).  On sait également que tous les administrateurs des 145 territoires du pays ne sont pas tous issus du Kasaï.

On pourrait aller dans les détails et en faire ici tout un livre.

Les entreprises étatiques

Prenons le cas des entreprises étatiques : Gécamines, Miba, SNCC, Regideso, Transco, RVA, OCC, Ogefrem, etc. Plusieurs provinces et tribus sont représentées aux commandes.

En conclusion, Martin Fayulu n’a fait que des accusations fausses et dénuées de tout fondement, révélant ainsi sa haine tribale légendaire contre les ressortissants du Kasaï. Plus grave, dans son message de nouvel an, il a parlé « de flux migratoires savamment orchestrés qui se dirigent vers Kinshasa et le Katanga ». Questions : orchestrés par qui et comment ? Des propos irresponsables et infractionnels dont la justice aurait dû se saisir.

Bref, se sachant en perte de vitesse politique, l’opposant Martin Fayulu a choisi d’activer le levier tribal pour intoxiquer et espérer se refaire une santé politique. Cette manière de faire l’opposition est à plaindre.

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